La diversité de la flore des prairies, c’est le terroir ! Graminées, légumineuses et plantes à fleurs contribuent à ce qu’aucun Comté n’ait le même goût d’une fruitière à une autre. Pour assurer la diversité des espèces végétales de nos prés, prenons soin de nos prairies permanentes
Sur l’ensemble des surfaces fourragères d’herbe en Bourgogne Franche-Comté, 85,6 % sont des prairies permanentes (source Draaf 2020). Une prairie «permanente » ou « naturelle » est une surface en herbe présentant une grande
diversité d’espèces végétales, qui n’a été ni retournée, ni resemée depuis au moins cinq ans.
Le futur cahier des charges du Comté, qui devrait être adopté en novembre prochain, impose aux producteurs de lait de la zone AOP d’avoir au moins 50 % de leur surface fourragère en prairies permanentes. « Ce n’est qu’un minimum qui devra être largement dépassé, puisque dans le cas contraire, il s’agirait d’un net recul par rapport à la situation actuelle », prévient Alain Mathieu, président du CIGC. « Imposer » n’est peut-être pas le terme approprié, puisque ces prairies permanentes disposent de nombreux atouts, dont un de taille : elles sont de l’or pour le Comté ! Leur flore native donne au lait, puis au fromage, le goût unique du terroir où elle s’épanouit. Si le goût du Comté n’est pas le même d’une fruitière à l’autre, c’est d’abord parce que l’herbe mangée par les vaches de Pleure en Plaine jurassienne n’est pas la même que celle qui pousse à Trévillers dans le Haut-Doubs ! Par ailleurs, les plantes sont le remède de bien des maux : certaines luttent contre les parasites, d’autres donnent de l’appétence, favorisent la lactation, facilitent la digestion ou aident à combattre les infections. Tout est là, dans ces prairies colorées qui, cerise sur le gâteau, embellissent nos paysages.
Comment maintenir la diversité floristique des prairies naturelles ?
L’avis de Jean-Marie Curtil, agronome à la Chambre d’agriculture du Doubs :
« L’un des premiers leviers de pilotage de la flore est la fertilisation. Il faut connaître la valeur fertilisante des amendements organiques épandus et adapter leur dosage à l’hectare. Il n’y a pas de règles universelles en la matière, tout dépend du sol et de ses besoins. Surfertiliser reviendrait à inviter dans sa parcelle des espèces comme le rumex ou le chardon, friandes de nitrates », explique Jean-Marie Curtil. Le spécialiste cite par ailleurs d’autres points de vigilance : limiter le tassement en évitant le piétinement des bovins et le passage des machines, de plus en plus lourdes, sur des sols non ressuyés. Autre calvaire pour les prairies : le surpâturage, « terriblement destructeur lorsqu’il est associé à la sécheresse ». Le rythme de fauche a lui aussi son importance.
Comment restaurer une prairie permanente dégradée ?
L’avis de Sylvie Bombrun, agronome à la Chambre d’agriculture du Jura :
La prairie est le reflet de ce qui se passe en dessous ; le fonctionnement du sol est la clé. Trouvons ce qui dysfonctionne et travaillons à l’améliorer », invite Sylvie Bombrun. La conseillère assure que la présence de certaines espèces dans une prairie donne une indication juste des pratiques agricoles à l’œuvre. « Cela permet de faire un premier diagnostic », assure l’agronome qui travaille actuellement à deux types d’expérimentations. La première, déjà réalisée, a consisté à aérer mécaniquement les sols avec des outils de scarification ou de décompactage. « Cela fonctionne s’il reste encore un peu de vie dans le sol », précise-t-elle. La seconde expérimentation, qu’elle espère pouvoir mettre en place ce printemps, consiste à apporter du basalte, associé à du fumier et des extraits fermentés de plantes. « C’est le triangle de la fertilité. Il s’agit par cette action de redonner de la vie aux sols compactés sans activité biologique. » D’autres techniques comme le sablage des prairies pour faire remonter le PH (si nécessaire, faites un diagnostic d’acidité avant d’agir) semblent montrer de bons résultats et seront testés.