L’équipe terroir a rendu sa copie à la fruitière d’Arbois. La diversité des sols alliée à la fermentation propionique donnent un Comté au goût très torréfié.
L’équipe terroir du CIGC a étudié le Comté de la fruitière d’Arbois de 2000 à 2004 et a rendu sa copie à l’automne. Maurice Etiévant, le président de la seule coopérative jurassienne située en ville – il y en a deux sur la zone AOC, l’autre étant celle de Pontarlier – pense aujourd’hui que le programme terroir est très positif, « puisqu’avec lui chaque coopérative a son identité affichée, et les sociétaires connaissent mieux les caractéristiques de leur terroir, tout en sachant qu’ils coopèrent à un fromage qui a un caractère bien à lui. » Mais il est moins convaincu de la facilité à faire passer le message au grand public : «Il faut des gens capables de développer tout ça.»Yveline Bobillier, l’épouse du fromager et responsable de la boutique, ne pense pas autre chose : « Il est intéressant de faire comprendre aux gens que l’on a un terroir, lié à un climat, à des sols, à une flore variée dans les prairies. Mais on ne peut pas tout expliquer ». «Pour se familiariser avec toutes ces infos, heureusement qu’on a le panneau», complète le président de la fruitière.
Du morcellement du bassin laitier et de l’éloignement de ses producteurs – dû à la vigne et à l’agglomération d’Arbois – la coopérative tire un atout : ses sols sont très diversifiés, allant de la plaine bressane humide aux terres supérieures du premier plateau, en passant par les sols pentus du Revermont et de la reculée des Planches-en-Arbois.
Ces terres s’échelonnent entre 240 et 570 mètres d’altitude, bénéficient de précipitations moyennes (1250 mm par an) et d’une température assez élevée (10,8°C en moyenne), et l’étude du terroir a recensé 39 UAP (unités agropédologiques) : des marnes du trias entre Buvilly et Grozon ou Arbois, des calcaires marneux entre Arbois et Pupillin ou Villette, du jurassique moyen sur les bords du Revermont, des sols très superficiels sur la bordure du premier plateau, quelquefois profonds côté Bresse, et parfois plus ou moins étanches selon les saisons.
Cette diversité des sols apporte de la diversité floristique. Selon Florence Compagnon, botaniste au CIGC, on note la présence de flouve odorante, de houlque laineuse, de paturins, de sainfoin, de lotier, de pissenlit ou de gaillet blanc. «On observe 15% de diverses fourragères, qui contribuent au goût du lait», note Florence Bérodier, ingénieur qualité au CTC. Une diversité due, selon Maurice Etiévant, à une exploitation peu intensive « et à une fauche très étalée dans le temps, notamment à cause de la double activité des agriculteurs, qui sont souvent aussi des viticulteurs».
Le terroir et la végétation jouent autant sur le goût que les choix de fabrication. Les fromages d’Arbois sont originaux. Dès qu’ils ont passé un certain seuil de maturité, les arômes torréfiés, grillés et caramélisés dominent. C’est tout le savoir-faire de l’affineur d’associer mûrissement de la pâte et fermentation propionique.
C’est aussi le combat de Maurice Etiévant, qui estime que le cahier des charges n’est pas assez précis à ce sujet. Pour le jury terroir qui a dégusté pas moins de douze fromages d’Arbois, de différentes saisons, le goût se décline en notes grillées et même de chocolat, associées à des arômes de noix et de noisettes grillées. Un comté qui, selon le président de la coop, s’accorde parfaitement avec un assemblage chardonnay – savagnin.
La Coopérative d’Arbois en bref…
14 producteurs.(Mesnay, Montigny-les-Arsures, Pupillin, Buvilly, Grozon, Villette-les-Dole, Arbois)
2 millions de litres de lait
Thierry Bobillier (fromager), Sébastien Martin (second), Alexandre Jambaud (apprenti)
Affineur: Rivoire-Jacquemin (Montmorot)